Spectacle

26 et 27 mars 2004 à 20h30<br /><br />28 mars 2004 à 17h00 - Théâtre Équestre Zingaro<br /><br />176 avenue Jean Jaurès<br /><br />93300 Aubervilliers

PETRONA MARTINEZ

Trois soirées sous le signe du métissage entre l'Afrique et l'Amérique Latine qui réuniront Petrona Martinez et le groupe Chuchumbe.

Acclamés dans leurs pays respectifs, ces artistes font vivre des musiques traditionnelles en leur insufflant sans cesse leurs émotions et leur vécu. Entre héritage et actualité, quelque chose "se passe", c'est bien là tout le sens de la tradition.

Colombie

PETRONA MARTINEZ, Bullerengue de Carthagène

Considérée en Colombie comme une reine et un trésor national, Petrona Martinez est une des voix afro-américaines les plus célèbres de la côte des Caraïbes. Fille et petite-fille de chanteuses de bullerengue, ce petit bout de femme séduit par son entrain et son dynamisme sur la scène où elle est entourée de sa famille et de ses enfants tambourinaires ou choristes. Elle chante le bullerengue, cette "danse chantée" pratiquée exclusivement par les femmes en Colombie, sur la Côte caraïbe au nord-est du pays. C'est d'ailleurs aux alentours des anciens palenque, villages refuges des esclaves qui s’enfuirent des plantations, que naît le bullerengue en Colombie.

À l’occasion des fêtes religieuses de la Saint-Jean et de la Saint-Pierre (24 et 29 juin), les femmes enceintes ne pouvant pas assister aux fandangos (bals populaires), se réunissaient dans les patios des maisons pour pratiquer des chants à répons, danser et "frapper du tambour et des mains". Une chanteuse improvisait des vers et les autres femmes répondaient en chœur. D’origine africaine, le chant est rythmé par la percussion des tambours frappés par des hommes.

Née en 1939, Petrona Martínez habite à Palenquito, un hameau très pauvre situé sur la route menant au palenque de San Basilio, village de tradition guerrière, non loin de Carthagène. Les palenqueros de San Basilio, comme tous les Noirs de la région, sont très fiers de leurs ancêtres, les esclaves déportés du Sénégal ou de l’Angola.

C'est auprès de sa grand-mère et de son arrière-grand-mère que Petrona apprend le bullerengue. Elle a découvert assez tardivement qu'elle était capable d'en composer elle-même. L’assassinat de son fils aîné la plonge par la suite dans un deuil strict qui la met à l’écart de la scène. Quelques années plus tard, elle se remet à composer des chants respectant d’autant plus les valeurs traditionnelles de la musique dans lesquelles elle a grandi. Pour ses chants qui sont profondément ancrés dans la tradition, elle puise son inspiration dans la vie quotidienne, à la fois difficile et magique de Palenquito. Mais elle y exprime aussi toute cette culture orale transmise de génération en génération, marquée par un syncrétisme entre les croyances et les rites d'origine africaine et la religion catholique : les superstitions, les légendes autour des ancêtres, la joie d’accueillir un nouveau-né, la douleur des veillées funèbres, ou tout simplement son admiration pour Celia Cruz, Petrona Martinez passe de la plus profonde douleur à l'exaltation de la joie de vivre.

Mexique

CHUCHUMBE, Son Jarocho de Veracruz

Fondé en 1991, l'ensemble Chuchumbé fait revivre la tradition du son jarocho, style chanté et dansé particulier à la région du Sud de Veracruz. Au Mexique, le son est une appellation générique qui désigne la musique rurale. Il est aussi le genre musical type des populations métisses. Ses origines remonteraient à l'Espagne : il s'est répandu au temps de la conquête et a donc été assimilé par des populations qui lui donnèrent rapidement une autre couleur et des caractéristiques typiques des différentes parties du Mexique. Aujourd'hui, le son jarocho reflète ce métissage par ses composantes caribéennes, africaines et espagnoles. Certains même y trouvent des influences arabes que les espagnols ont ramenées dans leurs bagages. Musique festive avec parfois certaines intonations qui portent à la mélancolie, notament quand les paroles, qui sont encore éventuellement basées sur les textes espagnols du XVIe siècle, abordent l'amour. Mais les paroles peuvent être aussi d'inspiration locale et aborder les mythes et légendes de la vie paysanne. Parfois, le son est improvisé et deux chanteurs se livrent à des joutes poétiques. Cela se passe notamment à Tlacotalpan, petite village non loin du port de Veracruz, pendant la fête de la Vierge Candelaria, patronne de tous les jaraneros. Là pendant trois jours et deux nuits, tous les groupes se retrouvent pour d'interminables joutes, mais aussi, pour danser et faire la fête avec la population locale.

Une des principales caractéristiques du son jarocho est d'être souvent joué sur la harpe, avec accompagnement de guitares de tailles différentes (requinto et jarana) et percussion. La danse est exécutée par des couples et consiste en de rapides mouvements des pieds ou zapateado dont les répercussions sur une petite estrade ou tarima, accompagnent les parties instrumentales.
L'ensemble Chuchumbé participe à tous les fandangos et fêtes traditionnelles de la région du Sud de Veracruz. Les musiciens ne se contentent pas de faire des recherches et d'interpréter les vieilles chansons oubliées du patrimoine, mais ils participent aussi activement à la renaissance de cette forme musicale en enseignant le son jarocho et la facture des instruments de la région, tout en composant de nouvelles chansons dans l'esprit de la tradition. Véritablement adulés par le public, chacun de leurs spectacles au Mexique est un véritable triomphe.

Arwad Esber

Informations pratiques

> Chuchumbe
en tournée 23 mars, Le Cratère hors-les-murs, Alès 2 avril, Opéra de Lyon
> À écouter
Colombie - LE BULLERENGUE - Petrona Martinez CD Ocora / Radio France C 560 129