Christian Voulgaropoulos

MCMix Bhajan - Ashwini Bhide-Deshpande MCMix#2 - Inde du Nord

En écho à l’exposition « Femmes peintres du Hazaribagh », le MCMix de ce mois d'avril vous propose de (re)découvrir l’une des grandes voix de la musique hindoustanie : la chanteuse de Khayāl Ashwini Bhide-Deshpande, invitée du dernier Festival de l’Imaginaire.

L’extrait choisi présente un chant dévotionnel bhajan attribué au Saint-poète Kabir (XVe siècle) basé sur le rāga chārukēsi : « Ajapā jāp japo bhā'ī sādhō… » (Ô Ami, fais une guirlande de souffles en récitant continuellement et silencieusement le nom de Dieu).

Ashwini Bhide-Deshpande est issue d'une famille de musiciens de Mumbai. Fait assez rare pour être souligné, elle a été formée au chant Khayāl par sa mère, Manik Bhide, une ancienne élève de la célèbre chanteuse Mogubai Kurdikar (1904-2001), après avoir reçu une première initiation musicale avec Narayanrao Datar et suivi un cursus au sein de l’école de musique Gandharva Mahavidyalya. Après plusieurs années de formation auprès de sa mère, elle rejoint Ratnakar Pai (1928-2009), un artiste formé par les descendants d’Ustad Alladiya Khan, le fondateur du gharānā de Jaipur-Atrauli, afin de s’initier aux subtilités de cette école stylistique dont elle est aujourd’hui l’une des brillantes représentantes.

Parallèlement au chant Khayāl, Ashwini Bhide-Deshpande est également une interprète experte des répertoires poétiques dévotionnels (bhajan et abhang). Ces derniers célèbrent une divinité hindoue ou le divin sous sa forme non-incarnée et figurent l’amour mystique du dévot envers son dieu. Nombre de ces poèmes sont attribués aux grands saints-poètes indiens ayant vécu entre le XIIIe siècle et le XVIe siècle et dont les œuvres ont été transmises conjointement par la tradition orale et la tradition écrite.

Kabir est certainement le sant (littéralement « saint ») le plus connu du sous-continent indien, apprécié pour son style et sa poésie mystique. Né dans une famille modeste de confession musulmane de la caste des tisserands, Kabir a grandi au XVe siècle à Varanasi (Bénarès), la ville sainte de l’hindouisme. Ses poésies célèbrent l’amour divin dans une langue simple riche de métaphores, illustrant un message toujours d’actualité.

Distribution

Ashwini Bhide-Despande, chant
Vinod Lele, tabla
Vinay Mishra, harmonium
Ashish Verma, tampura

Durant la performance, l'artiste insère et improvise autour des distiques du poète avant de présenter le "cœur" du bhajan.

La trame du texte

Ajapā jāp japo bhā'ī sādhō
Sānsonkī kar lo mālā.

Hāth sumaranī bagal katarnī
Yah kyā raca diyo cālā ?
Logonke bhāve bhakti kamāve
Sāhib ke mukh kālā.

Sādhō santakī sevā kar le
Santonkā des nirālā
Kahat Kabir suno bhā'ī sādhō
Pī lo nirgun pyālā.

Proposition de traduction

Ô Ami, fais une guirlande de souffles
en récitant continuellement et silencieusement le nom de Dieu.

Les graines du chapelet d’une main, le couteau de l’autre,
uel genre d’illusion est ceci ?
Ils adoptent une attitude de dévotion (bhakti),
mais ils sont indignes du Seigneur.

Jusqu’à ce tu regardes et ressentes le divin,
l’âme ne s’illumine pas.
Sans le vrai maître, la clé ne rentrera pas
et le cadenas de l’illusion ne s’ouvrira pas.